Digitalisation et nouveaux modes de recrutement

Entretien avec Vigrine BORDIER, Directrice des Ressources humaines au Service de Santé au Travail de la Région Nantaise (SSTRN)

Avez-vous déjà entendu parler du recrutement digital et ses nouvelles formes ?

C’est indispensable je dirai car il faut toujours adapter ses outils et méthodes en fonctions des profils et recherches effectuées. Dans certains domaines, nous pouvons considérer ne pas être à la « page » si ces outils sont absents, et ne pas être performant d’un point de vue recrutement. Il faut donc à la fois être visible, mettre en avant la marque employeur… C’est également indispensable par rapport aux générations actuelles qui fonctionnent uniquement via le digital.

Que pensez-vous des nouvelles formes de recrutement numérique ? Pensez-vous qu’elles soient réellement indispensables ?

C’est indispensable, mais c’est vrai que ça génère beaucoup de candidatures qui ne sont pas vraiment en adéquation avec le profil et le poste que l’on propose. Ca nécessite également de mettre en place des outils pour gérer le recrutement et pour trier, ce n’était pas forcément le cas lorsqu’on travaillait avec des candidatures par courrier ou par mail. Cela amène donc une remise en question et une digitalisation du recrutement en interne ; ne pas penser qu’à l’aspect pratique pour le candidat ou la marque employeur, il faut véritablement penser ce processus en amont pour ne pas être submergé.

Quel.s mode.s de recrutement lié.s au digital utilisez-vous ?

Via notre site internet, nous avons mis en place la possibilité de postuler en ligne, nous relayions également les informations sur LinkedIn. Nous avons également des abonnements particuliers, notamment avec Ouestjob où nous gérons des annonces en ligne. Nous sommes également en train d’instaurer un outil en interne pour la gestion du recrutement afin d’éviter une perte de temps liée à l’abondance des candidatures. Dans un soucis de qualité et d’efficacité, cet outil va permettre d’effectuer un retour aux collaborateurs et dans le traitement, faciliter le processus administratif de l’intégration du collaborateur. Nous allons donc utiliser le logiciel Federis, qui va gérer le processus de recrutement de façon informatisée.

Pensez-vous qu’il y ait des conséquences positives ou négatives de ses nouvelles formes de recrutement par rapport aux critères de choix de compétences ?

Je suis un peu réfractaire à tout ce qui est “moteur de sélection”, notamment par des mots clés. Je trouve que cela standardise un recrutement, et par défaut, passer à côté d’une candidature atypique. C’est la raison pour laquelle je suis un peu réticente, en entreprise c’est également intéressant de ne pas avoir que des clones mais un panel de personnalités et de profils. L’aspect péjoratif de la digitalisation serait pour moi de passer à côté d’un bon candidat. Mais, c’est aussi valoriser l’image, être en adéquation par rapport à l’ère du temps et à la digitalisation de la société. C’est aussi l’image de la société dans laquelle on travaille qui dépend des outils que l’on utilise.

Qu’en est-il du CV et de la lettre de motivation ?

Le CV ainsi que la lettre de motivation restent d’actualité. Nous constatons cependant que les candidats ont de moins en moins tendance à envoyer des lettres de motivation. Via la digitalisation, nous observons une abondance de candidature mais qui ne prennent pas le temps de répondre correctement ou qui ne personnalisent pas leur candidature. Ces profils représentent un vivier important qui ne sont pas retenues. 

Les candidatures seulement dotées d’un CV, les regarder vous ?

J’ai plutôt tendance à regarder les candidatures, mais pas de façon systématique si une lettre de recommandation est conseillée dans l’annonce. Quand on est sur des profils très rares et que l’on a pas beaucoup de candidatures, nous allons quand même regarder les CV. C’est pour cette raison que je ne peux avoir un discours catégorique. 

Quelles sont les conséquences du numérique sur le fonctionnement de l’entreprise (financières, stratégiques, fonctionnelles) ? 

Je dirai que c’est un transfert de fond des moyens et des budgets vers le digital. Nous travaillons en étroite collaboration avec le service communication sur ces processus. Cela me parait indispensable, et nous permet de déléguer la gestion de certains supports comme LinkedIn à ce service, d’autant plus que nous n’avons pas forcément de personne qui y est dédiée ou qui a le temps de s’approprier cette charge de travail supplémentaire. 

D’un point de vue stratégique, nous pouvons revenir à l’image de l’entreprise qui est favorisée puisque « jeune », surtout pour des structures comme la mienne qui existe depuis longtemps. Cela nous permet donc de capter des profils qui peuvent nous intéresser et vont nous permettre d’évoluer dans nos valeurs et dans l’image de l’association. 

Avez-vous déjà utilisé les supports tels que Skype ou d’autres pour réaliser des entretiens ?

J’ai pu réaliser des entretiens téléphoniques avec visio ou Skype mais ce n’est pas systématique. Ces outils facilitent le processus quand le candidat est loin ou permettent un gain de temps. Je trouve cependant qu’il y a un manque de contact et ça peut être déstabilisant lorsqu’on est pas habitué. Ca l’est également beaucoup pour les managers lorsqu’ils participent à l’entretien, on sent bien qu’ils ne sont pas vraiment à l’aise. 

Quel.s parallélisme.s établissez-vous entre le recrutement numérique et le recrutement classique en termes d’avantages et de désavantages de chacune des deux formes ? 

Ce qui avantage, c’est peut être la réactivité et le fait d’avoir plus rapidement des candidats et donc pouvoir raccourcir la durée du recrutement. Pour le reste, si l’on a en interne un outil de gestion qui nous permet de gérer le digital, cela permet un réel gain de temps de gestion et qualité.

Dans votre travail, pensez-vous qu’il soit possible que le digital bouleverse totalement le recrutement (plus de papier, etc) ? 

Je pense que nous ne sommes pas prêts. Peut être dans les grandes structures… Mais il ne faut pas penser que entreprise, il faut penser également candidat, et il apparaît que tous les candidats ne sont pas prêts à passer au digital. Notamment en fonction des catégories de populations que vous avez à recruter, dans mon cas, je recrute des personnes qui n’utilisent pas du tout le digital. Si j’utilisais des outils liés au digital, je serai à l’opposé du “bon sens”. C’est donc un outil RH mais à adapter en fonction du contexte, besoins et secteur de l’entreprise. Donc oui au digital pour mon organisation car cela me permet de capter de nouveaux profils, de nouvelles personnes et la jeune génération, mais pas la totalité parce que sinon je vais me couper de mon coeur de métier et des métiers stratégiques pour l’association. 

Est-ce que au sein de votre service, certains de vos collaborateurs rencontrent des difficultés liées à la digitalisation ? 

V. BORDIER : J’ai une équipe assez jeune, donc ils sont plutôt moteur de la mise en place des outils qui permettent de moderniser les processus RH et y compris dans le recrutement donc c’est très intéressant. Si on est pas à l’aise avec la digitalisation, on s’appuie sur les personnes plus jeunes de notre équipe pour nous faire des propositions.


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