Le Service Après-Vente (SAV) à vie dans l’industrie automobile : une offre osée qui a de l’avenir

LE SAV, UN LEVIER DE GÉNÉRATION DE REVENUS ET DE FIDÉLISATION CLIENT

Le SAV devient un domaine de plus en plus important pour les industriels, qui tendent à le considérer comme un véritable atout stratégique. Les entreprises ont compris l’impact direct de l’expérience client sur leurs performances financières. De récentes études attestent de cette réalité, suggérant même que les services deviennent un levier financier pour les industriels sur le long terme. Un rapport de Bain & Company affirme par exemple que les services affichent en moyenne des marges brutes de 39% , soit un chiffre bien plus élevé que les marges liées à la vente de nouveaux produits (27 %).

« Un service après-vente optimisé et bien géré est un atout considérable tant d’un point de vue efficacité métier, qu’expérience utilisateur et client ou avantage compétitif. Le SAV devient un centre de profit de l’entreprise et un levier de croissance et de fidélisation client. [1]»

LA GARANTIE A VIE DANS LE SECTEUR AUTOMOBILE

Quand un véhicule neuf est acheté, une garantie constructrice est appliquée. Il s’agit d’une assurance qui couvre le problème relatif aux pannes mécaniques, électroniques ou électriques d’une voiture après son achat. Cette garantie assure certains services comme la prise en charge et le remplacement de pièces défectueuses, la réparation suite à des pannes, etc. Beaucoup de constructeurs automobiles garantissent leurs modèles pendant une durée définie dans le contrat de vente. Cette garantie est souvent de 2 ans pour les constructeurs européens, contre 3 ans et plus pour certains modèles plus chers et haut de gamme des marques asiatiques (7 ans chez KIA). La garantie Constructeur légale sur les voitures neuves est passée de un an à deux ans, pour un kilométrage illimité.

La garantie est levier de décision d’achat important pour le client, qui anticipe le coût d’entretien de la voiture, en plus d’avoir pris en compte le prix d’achat. De plus, malgré de bonnes pratiques dans le secteur, l’automobile est concerné par l’obsolescence programmée[2]. Les garanties donnent une certaine confiance aux clients lorsqu’ils engagent l’investissement.

Ces constats amènent à s’intéresser aux offres de garantie du secteur automobile et à étudier par exemple s’il existe des offres de garantie à vie. A priori, La garantie à vie n’existe pas dans le secteur automobile[3]. Ou plutôt, n’existait pas… Des offres émergent sur le marché, et se rapprochent de cette logique de SAV à vie, qui permet notamment d’attirer et de fidéliser des clients. On peut étudier le cas de Opel et de Hyundai.

  • LE CAS OPEL[1]

Le constructeur OPEL vient de lancer une «garantie à vie» sur un grande nombre de modèles. Cette formule se limite pour l’instant aux deux plus gros marchés européens de General Motors (GM): l’Allemagne et le Royaume-Uni. «L’opération sera d’abord évaluée dans ces deux pays avant d’être, éventuellement, étendue ailleurs», précise un ­porte-parole de GM en France. Il s’agit, certes, d’une garantie sans limite de durée mais elle prendra fin au-delà de 160.000 km. De plus, il faut régler des frais annuels minimes et la prise en charge des pièces défectueuses sera dégressive selon le kilométrage de la voiture. De 100% avant 50.000 km, elle passe à 90% jusqu’à 60.000 km et chute à 40% à partir de 100.000 km. Tout cela sous réserve d’entretenir régulièrement son ­véhicule dans un réseau agréé. Alors que les ventes de voitures en Europe viennent de chuter de 18,5 % en juillet (selon le cabinet JD Power), l’initiative reste astucieuse. Elle permet de faire parler de la marque, de montrer qu’après une forte période de turbulence elle retrouve initiative et sérénité, et surtout de rassurer les consommateurs quant à la fiabilité du produit. «Nous soulignons ainsi la confiance que nous avons dans la qualité et la valeur intrinsèque de nos produits», a expliqué le patron de GM Europe. C’est, enfin, une façon de maintenir la cote d’un véhicule à la revente, puisqu’un modèle d’occasion reste ­garanti (s’il a été vendu avant six ans et 100.000 km).

D’autres initiatives de constructeurs : Ces garanties constructeur avantageuses se révèlent finalement une bonne arme pour doper, souvent à moindres frais, la notoriété et l’image de qualité d’une marque. Toyota a été l’un des premiers à utiliser cet argument lorsqu’il s’installait sur le marché européen. Le constructeur japonais dépassait la barre des deux ans avec sa garantie de trois ans ou 100.000 km. Depuis, les coréens ont pris le relais avec des offres plus alléchantes. KIA a ainsi donné un coup de fouet à ses ventes en lançant une garantie de sept ans ou 150.000 km. Lancée en 2008 sur le seul modèle Cee’d, la formule a connu un tel succès qu’elle a été généralisée à toute la gamme en début d’année. Quant à Hyundai, propriétaire de la marque Kia, il fait bénéficier tous ses véhicules d’une garantie de trois ans avec ­kilométrage illimité, poussée à cinq ans sur certains modèles.

Au-delà du soutien des ventes, la formule permet pour le constructeur de fidéliser ses clients en les obligeant à effectuer un entretien régulier dans son réseau. Les mois qui viendront diront si pour Opel, comme pour ses prédécesseurs, la formule est gagnante.

  • LE CAS HYUNDAI[2]

Hyundai devrait trouver une parade à l’inégalité fiscale entre ses importations et celles des marques européennes. Global Engines, importateur exclusif de la marque, vient de lancer pour la première fois au monde une garantie illimitée. L’acquéreur ne devra plus se soucier ni de la limite de kilomètres ni de temps. Un pari très risqué puisque le concessionnaire prend à sa charge la garantie qui dépasse 3 ans. En fait, le constructeur sud-coréen n’offre qu’une garantie de 3 ans. «Nous avons renégocié la garantie avec le constructeur pour que les 3 ans soient illimités dans le kilométrage», explique Zineb Oukacha, directrice Marketing. La garantie à vie est valable pour le premier acheteur d’un véhicule particulier. Ce nouveau package s’applique uniquement aux futures acquisitions et n’a donc pas d’effet rétroactif. Aucune discrimination n’est faite à l’égard du type de clients que ce soit les particuliers ou les entreprises. Le management rassure sur d’éventuelles conditions drastiques liées à la nouvelle formule. «La garantie conserve les mêmes termes et conditions que l’ancienne version, à la seule différence qu’elle est illimitée en durée et en kilométrage», précise Oukacha. Cependant, pour bénéficier de ce service illimité, toutes les révisions périodiques et réparations doivent être effectuées uniquement au sein des ateliers Hyundai. Le non-respect de cette clause entraîne la nullité immédiate de la garantie. En cas de cession du véhicule, aucune relation de garantie ne lie  Hyundai au nouveau propriétaire. Toutefois, le nouvel acquéreur a la possibilité d’acheter une extension de garantie auprès du concessionnaire d’une période de 6 mois ou 12 mois.
Hyundai ne marchait pas à l’aveuglette avec ce produit. En général, les cessions de véhicules se font 5 ans après l’acquisition et la fin du crédit. Ainsi, le concessionnaire n’aura probablement à sa charge que les 2 ans de différence. Certains clients pourraient même sortir de la garantie pour pouvoir effectuer les révisions périodiques à moindres coûts auprès de petits garagistes. Un point que le management de Hyundai n’a pas négligé. «Nous avons poussé les révisions de 5.000 à 10.000 km pour les motorisations essence.  Ainsi, la révision ne se fera en moyenne qu’une fois par an», confie la directrice Marketing. Malgré l’ensemble de ces dispositions, Hyundai se lance dans une offre à haut risque. La marque espère avec cette garantie reconquérir des parts de marché et faire oublier le différentiel de prix avec les concurrentes européennes. L’importateur-distributeur a entrepris plusieurs investissements pour arriver à prendre en charge l’augmentation de la pression sur le service après-vente. L’entreprise dispose d’un centre de contrôle de qualité prélivraison, situé à Bouskoura. Des changements d’horaires ont également été opérés pour pouvoir accueillir plus de clients.

AVANTAGES ET INCONVÉNIENTS

Ces deux cas invitent à souligner les effets positifs générés par l’adoption d’une telle stratégie :

  • Attraction d’une nouvelle clientèle séduite par l’offre qui garantit la fiabilité du produit
  • Différenciation
  • Fidélisation des clients qui restent attaché au SAV de la marque
  • Maintien de la côte d’un véhicule à la revente (facteur d’attractivité pour le premier acquéreur)
  • Gain de parts de marché

Toutefois, la stratégie peut présenter certaines limites :

  • Surcharge des ateliers de la marque (augmentation des révisions et des réparations effectuées)
  • D’importants coûts liés aux réparations et aux services couverts par la garantie
  • Il y a tout intérêt pour les constructeurs à mesurer le rapport coûts/bénéfices de cette offre « à vie », mais l’idée est prometteuse et mérite d’être expérimentée dans d’autres secteurs, comme dans celui de la manutention par exemple. Dans le cadre d’un concours adressé aux étudiants, et organisée par l’entreprise MANITOU, il est demandé de trouver des solutions afin de renforcer l’attractivité de la marque. Travailler sur un Service après Vente “à vie” et la garantie des produits semblent être des leviers très intéressants.

[1]http://www.lefigaro.fr/societes/2010/08/06/04015-20100806ARTFIG00522-opel-lance-la-garantie-a-vie-sur-ses-modeles.php

[2] https://www.leconomiste.com/article/894244-automobilehyundai-ose-la-garantie-vie


[1] https://www.la-fabrique.fr/fr/blog/sav-lautre-enjeu-majeur-de-lindustrie-futur/

[2] https://www.halteobsolescence.org/automobile-le-prix-des-pieces-detachees-gonfle-artificiellement/

[3] https://www.alxmic.com/bientot-une-auto-garantie-a-vie-sur-le-marche/

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